Christian Mennrath, président du SNEC
Christian Mennrath, président du SNEC : « Les magasins de cuisine ne sont pas des endroits à risque : à nous de le faire valoir auprès des pouvoirs publics ! »
S’il mesure toute la difficulté de la tâche qui incombe au gouvernement en cette période si délicate, le président du SNEC (Syndicat National de l’Équipement de la Cuisine) entend plaider, dans le sillage de la FNAEM, pour la réouverture des magasins de cuisine, qu’il juge sans danger malgré la pandémie. Et quoi qu’il advienne dans les semaines et les mois à venir, estime Christian Mennrath, le secteur triomphera de la crise. Explications.
Cuisines & Bains Magazine : Quelle a été votre réaction à l’annonce de ce troisième « confinement » concernant, en tout et pour tout, seize départements ?
Christian Mennrath : Pour les personnes vivant et travaillant dans les départements en question, il s’agit là du troisième – et, je l’espère – dernier confinement. À nouvel épisode, nouvelles règles… Ce que je comprends parfaitement, au demeurant ; c’est en trébuchant que l’on apprend à marcher et, s’il y a un métier difficile à exercer aujourd’hui, c’est bien celui de gouvernant. Les décisions auxquelles nos responsables politiques sont confrontés sont toujours difficiles à prendre ; aussi nous appartient-il de les respecter et d’appliquer au mieux les mesures décidées par le gouvernement. Et c’est que ce que nous allons faire, en parfaite concorde avec la FNAEM et tout le secteur de l’Ameublement.
CBM : Certains acteurs de la profession nous ont pourtant fait part de leur incompréhension vis-à-vis d’un « deux poids deux mesures », qui voit les cordonniers ou les chocolatiers, par exemple, autorisés à ouvrir boutique, tandis que les cuisinistes sont contraints de baisser le rideau…
CM : Et je suis bien d’accord avec eux ! Je n’aime pas, d’ordinaire, me risquer à des comparaisons que je juge peu constructives. Néanmoins, je puis vous dire ceci : le risque est bien moindre d’être contaminé dans un magasin de cuisine respectant les jauges et les mesures de précaution sanitaires, que chez un chocolatier au moment du « rush » des fêtes de Pâques. Il est temps de regarder la réalité en face et d’acter que, compte tenu de leur surface, de leur fréquentation moyenne et des règles de bonnes pratiques en vigueur dans la profession, nos showrooms ne sont pas des endroits à risque !
CBM : Pour peu, bien sûr, que les cuisinistes se comportent de manière responsable en ce qui concerne l’application des dites pratiques…
CM : J’entends bien. Mais retenez que, dans la majorité des cas, les chefs d’entreprises sont avant tout des citoyens responsables ; aussi faisons-leur confiance pour appliquer les règles qui nous protègent. Contrairement au premier confinement, nous savons ce qui est dangereux, et nous savons surtout nous protéger de ces dangers. Même au sein de cet état centralisateur qui est nôtre, nous gagnerions à nous montrer, de loin en loin, un peu moins directifs.
CBM : Comment entendez-vous agir pour faire passer ce message ?
CM : En demandant au gouvernement, par la voix de la CNEF (Confédération Nationale de l’Équipement du Foyer) dont le SNEC fait partie, d’autoriser la réouverture des magasins d’ameublemement ; à tout le moins de permettre à ces derniers de recevoir leurs clients sur rendez-vous uniquement. Nous entendons bien faire valoir auprès des instances concernées que les spécialistes de la cuisine équipée remplissent d’ores et déjà, dans leurs showrooms, toutes les conditions nécessaires au contrôle et à l’endiguement de l’épidémie. Si, comme je vous le disais en début d’entretien, il appartient à une chambre syndicale patronale de respecter, en toutes circonstances, les décisions du gouvernement, elle ne doit pas pour autant renoncer à défendre les intérêts de ses adhérents auprès des pouvoirs publics… Et c’est bien ce que nous avons l’intention de faire !
CBM : Que dire, pour l’heure, des conditions de travail des cuisinistes œuvrant dans les départements confinés ?
CM : La question mérite en effet d’être posée ; un décret chassant l’autre depuis octobre, ou plutôt le modifiant, tirer la situation au clair n’a rien d’une sinécure, croyez-moi sur parole (rire). Plus sérieusement, il convient de préciser qu’à l’heure où je vous parle, les activités de livraison, de pose et d’installation sont toujours autorisés, en respectant scrupuleusement les protocoles sanitaires, cela va sans dire. Je m’en félicite, car nous pourrons au moins concrétiser les commandes déjà passées. La contrainte principale que subissent nos confrères touchés par le confinement concerne, cela va de soi, l’impossibilité d’ouvrir leurs magasins au public. Nous saurons surmonter ces difficultés mais ce confinement ne doit pas durer plus quatre semaines. Je précise par ailleurs que la vente à distance est, quant à elle, parfaitement autorisée.
CBM : Encore faut-il savoir la pratiquer, cette vente à distance…
CM : Des contraintes naissent les opportunités. En un an, nous avons beaucoup appris dans ce domaine. Comme chaque profession, nous avons été obligés de nous adapter à la situation qui s’imposait à nous, d’innover en matière d’approches commerciales et de réinventer nos méthodes de travail. La distanciation sociale, nous le savons aujourd’hui, ne constitue plus nécessairement un frein à la vente : nous savons recueillir l’intérêt du consommateur pour un produit par le biais d’Internet, échanger avec lui en visioconférence, lui faire découvrir, de manière interactive, la conception de son projet, convenir d’un rendez-vous en présentiel lorsque les circonstances le permettent, etc. Du reste, le SNEC publiera prochainement, à l’intention de nos adhérents, les règles de bonnes pratiques et de mise en œuvre de la vente à distance, à domicile et en magasin.
CBM : En somme, le SNEC et son président demeurent optimistes…
CM : Plus que jamais ! Ce qui ne nous tue pas nous rend plus fort. Les résultats extraordinaires enregistrés par la filière, l’an passé, dans les circonstances que l’on sait témoignent d’ailleurs de la justesse de cette maxime de Nietzsche. Je ne saurais dire, à l’heure qu’il est, combien de temps durera ce confinement, ou si d’autres départements seront ajoutés à la liste dans les semaines à venir. Mais je suis certain d’une chose : quoi qu’il advienne, notre secteur sortira renforcé de la crise. L’engouement dont font preuve nos compatriotes pour la cuisine équipée ne faiblit pas en ce début d’année, cela dépasse même toutes nos espérances ! De fait, la demande pour nos produits prend une telle ampleur que nous devons parfois réaliser des prouesses logistiques pour la satisfaire. Aussi je puis d’ores et déjà l’assurer : pour les 1300 adhérents du SNEC comme pour tous les autres membres de la profession, 2021 sera une très, très belle année !