À en croire Sonia Déléani, la couleur ne se résume pas qu’à ces teintes chaudes et froides – dont tout un chacun parle – et les ambiances auxquelles on les associe : elle doit d’abord être perçue comme « la 4e dimension de notre environnement : celle de l’affectif, du sensible, de l’intime. Ce n’est pas un artifice secondaire relevant de la simple décoration, mais un élément déterminant pour caractériser un produit, un espace, une marque ». Les messages et valeurs que portent chaque couleur – et dont est plus ou moins conscient le particulier – vont donc conditionner les choix de ce dernier.
Au-delà des pigments et de la lumière qui la composent, la couleur, rappelle Sonia Déléani, demeure « immatérielle et perceptive, donc subjective ». Multisensorielle, elle sollicite avant tout la vue, mais également le toucher, le goût, l’odorat et l’ouïe.

Rainbow Studio. Sonia Déléani designer coloriste
Pour mettre en mots et rendre tangible cette « abstraction subjective », il est tout un vocabulaire que nous maîtrisons plus ou moins, selon les cas : nombre d’entre nous connaissons les couleurs primaires, secondaires, tertiaires, les teintes chaudes et froides… Beaucoup, cependant, oublient que la couleur ne se résume pas qu’à sa seule dimension chromatique, mais qu’elle s’identifie également à sa luminosité (clarté d’une teinte) et à sa saturation, ou nuance (éclat d’une teinte). « Alors certes, précise Sonia Déléani, les chauds sont plutôt accueillants, les froids plutôt relaxants… mais on peut aussi regrouper et décrire les couleurs par classements plus narratifs que chromatiques. On communique alors par univers colorés, plus évocateurs et plus riches : pastels, acidulés, saturés, atténués… » Ces familles peuvent être combinées pour créer différents styles et tendances: tradition, éclectique, nature, brut, urbain…

Rainbow Studio. Sonia Déléani designer coloriste
Influant sur notre humeur, nos états d’âme et nos ressentis (voire notre santé), la couleur, selon les différentes façons dont elle est utilisée, crée l’ambiance. « Pour une ambiance stimulante et joyeuse, par exemple, on utilisera des teintes acidulées et saturées (voire assourdies), explique Sonia Déléani ; elles créeront une atmosphère énergique, intense, gaie. L’harmonie peut être contrastée et polychrome, sans être agressive. Cette ambiance conviendra aux pièces du matin que sont la cuisine, la salle de bains, le bureau… Une bonne lumière naturelle les rendra encore plus vibrantes et translucides. » Les couleurs appropriées à une pièce dépendent également de nombreux critères : quelle taille fait-elle, quelle est son orientation (apport de lumière), est-ce un espace familial partagé, personnel ou intime, comment est-elle meublée…?

Sonia Déléani décrypte cette cuisine comme « Un joyeux mélange de styles, de textiles, de motifs pour un intérieur plein de liberté et de créativité décomplexée ; l’esprit chromatique, quant à lui, est multicolore, osant les contrastes et les oppositions ». Modèle Lune d’Eau de Perene
Pour doser au mieux la couleur dans une pièce, on tâchera de ne pas excéder 3 teintes : la teinte dominante (60 à 80 %), donne l’ambiance générale, tandis que la teinte complément (15 à 30 %) souligne et met en évidence des fonctions. Enfin, la teinte accent (5 à 10 %) attire l’oeil, apporte de l’énergie, du dynamisme, de l’originalité, voire du précieux. Sonia Déléani rappelle, par ailleurs, que « les couleurs ont cet incroyable pouvoir de modifier les perspectives et les volumes, accentuant ou atténuant les profondeurs, gommant les défauts ou mettant en valeur les détails. Ainsi permettent- elles, en attirant l’attention ou en captant le regard, de modifier la sensation d’espace et d’offrir à certaines pièces l’intimité ou le dynamisme qui leur manque ». Retenons que l’utilisation de couleurs claires permet de dilater l’espace et de le rendre plus ouvert (en renvoyant la lumière), tandis que l’utilisation de couleurs denses « ressert » l’espace pour le rendre plus intime (en absorbant la lumière). Par ailleurs, les tons froids, en accrochant moins le regard et en le laissant filer, agrandissent l’espace, là où les tons chauds retiennent l’attention et nous recentrent, enveloppant par là même le volume.
Si ces règles peuvent aider au choix des couleurs, Sonia Déléani tient à rappeler que l’intérieur demeure « un espace de liberté personnel et unique, où toutes les transgressions, toutes les mises en scène restent à imaginer. Et, dans cet intérieur, la cuisine est un terrain privilégié ! « .
Que n’a-t-on écrit sur le rôle de la couleur dans l’habitat… Alliée précieuse pour créer des ambiances et personnaliser le cadre de vie, elle est avant tout affaire de goût. Mais encore faut-il savoir « doser et apprivoiser la matière couleur dans nos intérieurs », précise Sonia Déléani : diplômée de l’École Boulle, celle-ci, designer coloriste de profession, dirige l’entreprise Rainbow Studio, spécialisée dans la réflexion, la recommandation et la mise au point de couleurs et matières.